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Pendant les vacances, ils changent de statut

Livebenin

Si les périodes de vacances sont généralement considérées comme un temps de repos, un temps où les apprenants observent une pause dans leur programme académique, c’est tout le contraire pour certains qui vaquent à d’autres occupations. En effet, des vacanciers tels qu’on les appelle sont nombreux dans toutes les villes du Bénin à la recherche de leur gagne-pain. Autrement dit, ils préparent lentement mais sûrement la prochaine rentrée académique. Les apprenants travailleurs pendant les vacances, à quoi cela rime-t-il ? Quelles en sont les retombées ? Peut-on en être fier ? Notre production se propose d’aller dans l’univers desdits travailleurs.

Il sonnait quinze heures dans l’après-midi de ce vendredi quand le feu rouge s’est allumé au carrefour Saint Michel de Cotonou. Arrêt obligatoire pour tous. La chaleur était suffocante, le soleil brillait encore de mille feux. Svelte, visage dégoulinant de sueur, cils, cheveux très poussiéreux, chemise très délavée, l’ensemble des motos et voitures arrêtées ne nous a pas encore permis de descendre notre regard vers son pantalon et ses chaussures quand le jeune homme a couru vers nous. Le bras droit chargé des ustensiles de cuisine, le gauche des manuels scolaires, un gros sac très lourd au dos tel un voyageur. En fait, nous avons à première vue cru que c’était un touriste. Mais à notre grande surprise, notre hôte nous a proposé ses marchandises avec une première phrase « patron, faut voir, ce sont de bons produits ». À peine a-t-il scandé ces mots que le feu vert s’est allumé, donnant le passage libre à tous. Malheureusement nous n’avions pas eu de longs échanges avec lui afin d’en savoir davantage. Cinq cent (500) mètres après, au prochain feu, ce sont des jeunes comme lui que nous avons à nouveau aperçus.  En dehors de la ville de Cotonou, il faut remarquer que Calavi et de nombreuses autres villes sont le théâtre de ces spectacles de vente à la sauvette dans les feux tricolores. Nous avons donc décidé de mieux découvrir ces vacanciers ‘’jobeurs’’.

Ces activités que mènent les jeunes vacanciers

Pourvu que l’activité soit rémunératrice, ils se battront corps et âme pour l’exercer. On les retrouve aussi bien dans les points de mobile money que dans les ventes des appareils GSM à travers les villes. La plupart signent des partenariats avec des sociétés spécialisées dans les ventes de tous genres (jouets, ustensiles de cuisines, fournitures scolaires…). D’autres par contre se retrouvent sur les chantiers de construction en aidant les chefs maçons, dans des forêts pour la fabrication des charbons de cuisine. Il y en a même qui quittent le pays pour aller travailler hors des frontières. Si ces activités sont généralement menées par les hommes, certaines femmes ne sont pas du reste dans ce qu’on peut appeler ‘’JOB DE VACANCES’’. De jeunes étudiantes proposent leurs services aux patrons de restaurants, de bars et autres. Certaines se lancent même dans les ventes de friperies, des ventes d’eau glacée à tue-tête dans les marchés.

Généralement, ceux qui s’adonnent à ses activités selon nos recherches sont issues des familles relativement pauvres. Autrement, ils ne sont ni à la charge de papa, ni de maman. Ils se nourrissent à leurs propres frais. Si la plupart sont des orphelins, d’autres ne vivent plus qu'avec l’un des deux parents. Et comme on peut s’y attendre, ces pratiques ne sont pas sans impact.

Des conséquences cependant

À en croire le sociologue Urbain Amègan, enseignant chercheur à l’Université d’Abomey Calavi, les jobs de vacances permettent à ceux qui les font de prendre tôt le goût de l’entrepreneuriat. On voit de moins en moins des vacanciers désœuvrés, livrés à eux-mêmes, ce qui limite par ailleurs des petits vols dans les quartiers. Des apprentis vacanciers sont aussi parfois des étudiants très dynamiques, jouissant d’une intelligence inouïe selon ses dires.

Interviewé également sur la question, Jean-Luc Hounmenou, pédagogue et professeur de français dans les collèges et lycées à Cotonou indique pour sa part que les étudiants qui ont passé leurs vacances à travailler, sont pour la plupart fatigués en salle à la reprise. En début d’année, ils essayent de payer le nécessaire (scolarité, tenue kaki, fournitures), se voient parfois incapables de payer les documents et romans au programme. On ne les retrouve quasiment pas pendant les activités culturelles (journées culturelles, excursion…). « Mais attention, ils font souvent partie des majors de leur promotion », a-t-il déclaré. Nous sommes allés à l’Université d’Abomey-Calavi pour recueillir deux témoignages de gens qui  s'adonnent aux jobs de vacances. « Moi je travaille pendant les vacances pour pouvoir financer mes études, ma scolarité prochaine et aussi alléger la tâche aux parents, car si je ne profite pas des moments de vacances, cela pourrait être fatal à ma scolarité. À chaque vacance, j’ai toujours un chef maçon que j'accompagne sur les terrains de construction pour trouver un peu d’argent, car mes parents qui pourraient m'aider n'ont pas de grands moyens. Avec ces jobs de vacances, nous n'arrivons pas à préparer la rentrée scolaire, je veux parler du temps pour les groupes d'études. A tout cela s'ajoute la fatigue physique qui affecte la santé », a fait savoir Bolarindé Idohou, étudiant en 1ère année de Lettres Modernes.

« Il m'a toujours semblé bon de me trouver un petit job pendant les vacances pour tuer les temps libres et surtout pour ne pas trop dépendre des parents. C'est pourquoi j’intègre un groupe de jeunes gens du quartier qui déchargent les sacs de riz, et je sais qu'en faisant ces petits jobs, je pourrai m'acheter des vêtements bon marché qui me sont nécessaires. De plus, ces petits jobs de vacances renforcent en nous l'esprit de solidarité, d'entraide et motivent à travailler en groupe », affirme Cyriaque Dohou, étudiant en 2ème année d'Anglais.

Toutefois, il est important de préciser aux apprenants qu'il est nécessaire de bien choisir le job et aussi de ne pas le faire durant toute la période de vacances. Cela pourrait bien les épuiser et ils seront confrontés à une fatigue mentale qui ne sera pas sans conséquence sur leurs rendements scolaires.

Pascal Abihona

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