Le Kanvô du Bénin : AGↃNGLO VↃ (le pagne du roi Agonglo)
Tout comme d'autres peuples d'Afrique, le Bénin aussi une tradition vestimentaire dont le mérite de fabrication revient aux valeureux tisserands. Même si ce corps artisanal existait chez les Guédévi, premiers occupants du plateau d'Abomey, bien avant la fondation du royaume du Danxomɛ (Danhomey), plusieurs discours accordent son introduction à la cour royale d'Abomey au règne du roi Agonglo. LiveBénin en a fait une priorité. Ensemble, découvrons l'histoire.
Gbèkon-Houégbo : nous sommes en plein cœur de la cité royale d'Abomey. Une cité qui, de 1789 à 1797, a brillé sous le règne du Roi Agonglo, le huitième de la dynastie. Selon Corneille ADJEHOUNOU, instituteur et descendant de la grande collectivité Agonglo, de son nom fort ''So jɛ dé bɔ Agɔn glo'' (la foudre abat le palmier à huile et le rônier y résistant), Dada Agonglo a été cet intellectuel communautaire qui a mis les relations humaines et le respect de l'homme au centre de son règne. Constant ADONON, descendant de la collectivité Agonglo et acteur culturel, va ajouter qu'au cours de son règne, le roi Agonglo renforça le culte vodun et révolutionna plusieurs métiers d'artisanat d'art, dont le tissage artisanal.
En réalité, le tissage du raphia existait à Abomey bien avant l'accession au trône du roi Agonglo. Cela remontait au règne du Roi Houégbadja (1645-1685). Le coton va attendre les années 1710, sous le règne du Roi Agbadja (1711-1742), avant de commencer à être utilisé comme matière première du tissage artisanal (Inspiré du livre ''Métier d'artisanat et d'art traditionnels à Abomey' ', 2009, Boniface Boko Bonito, AsDTAR). Tout cela serait repris et renforcé par le roi Agonglo qui, à en croire Christophe ADONON, ancien tisserand, lors d'une expédition en pays Nagot, vers Kétou au Sud-est de l'actuel Bénin, va découvrir un tisserand dont l'art était remarquable.Il le ramena alors à la cour royale, l'installe en de bonnes conditions et lui ordonne d'enseigner son art à tous les princes et princesses. Car pour ce roi, il fallait occuper la jeunesse et la faire participer à toutes les activités d'envergure publique. Il disait que chaque prince devrait apprendre et savoir faire quelque chose. Ce temps et selon plusieurs écrits, le roi Agonglo est considéré comme l'instaurateur du tissage artisanal à la cour royale d'Abomey. Mais en vérité, il en est le révolutionnaire.
En tout cas, la descendance du roi perpétue la pratique du métier en son sein. La majorité des descendants de ce roi tisse même si chacun apprend ou pratique un autre métier. Car les enfants, juste en assistant leurs parents qui sont tisserands, finissent par maîtriser les techniques. On dira que le savoir-faire lié à la pratique de ce métier est transmis de génération en génération. De nos jours, le quartier Gbèkon-Houégbo fondé par le roi Agonglo vit encore du tissage artisanal. Dans la cour des maisons comme sur certains lieux publics, l'on remarque toujours des métiers installés et des descendants Agonglo, toujours à l'œuvre. Le lieu de pratique le plus vivant, c'est le palais princier du Roi.
Réhabilité en 1997 suite à la célébration du bicentenaire de la mort du Roi Agonglo, ce site abrite aujourd'hui, le Centre Agonglo de Tissage Artisanal. C'est la matérialisation de l'ambition de réunir les princes et princesses tisserands autour de l'héritage ancestral. Une vision portée par l'abbé Barthélemy ADOUKONOU, aujourd'hui Monseigneur de l'Église catholique romaine à la retraite. Ce centre abrite une communauté de près d'une cinquantaine de tisserands qui travaille en coopérative. C'est un musée vivant qui offre au visiteur, l'opportunité de suivre toute la chaîne de tissage d'une toile et de transformation d'une bande en produits finis. Juste que ces tisserands peinent à adapter leurs productions aux exigences de la modernité.Et c'est l'une des raisons d' être du projet bilatéral ''Territoires Tissés'' qui depuis 2019, fait des merveilles au service de la sauvegarde des savoir-faire ancestraux liés au tissage artisanal. LiveBénin vous le fait découvrir à partir du prochain numéro de cette série Tisserand d'hier, Tisserand d'aujourd'hui, entièrement offert au tissage artisanal à la cour royale d'Abomey.
Oyolabi Angelo ALAPINI